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Débat : Quelle contribution des entreprises à la protection sociale ? (L’Humanité)

En pleine discussion pour le budget au Parlement, un rapport, présenté à l’Assemblée nationale, interroge l’efficacité des exonérations de cotisations sociales.

Selon toutes les études économiques, l’efficacité des exonérations patronales est contestable. Elles sapent notre modèle social.

Notre système de santé traverse une crise profonde, et nous devrions plus que jamais être à la recherche de nouveaux financements pour conserver notre modèle social. C’est pourquoi il est absolument nécessaire de remettre en question l’emballement des exonérations de cotisations sociales patronales. En effet, depuis les années 1990, la politique de l’offre s’attaque aux cotisations sociales patronales supposément trop coûteuses. Ces niches sociales visent initialement à combattre le chômage des travailleurs les moins qualifiés et à reconquérir des parts de marchés internationaux. Toutefois, en trente ans, ces exonérations ont explosé pour atteindre plus de 80 milliards d’euros pour l’ensemble des allègements de cotisations sociales et des exemptions d’assiette.

Avec Marc Ferracci, député de la majorité, nous avons présenté un rapport d’évaluation et de contrôle des lois de financement de la Sécurité sociale. Les échanges constructifs que nous avons eus avec les membres de la commission des Affaires sociales ont permis de remettre en question le « bandeau famille » (exonérations de cotisations familiales, NDLR), n’ayant pas d’effet sur l’emploi ni sur la compétitivité. La piste envisagée est alors de supprimer purement et simplement les exonérations de cotisations sociales qui frappent les salaires supérieurs à 2,5 Smic, ce qui pourrait rapporter 1,6 milliard d’euros au minimum.

Toutefois, le projet de loi de financement de la Sécurité sociale présenté par le gouvernement n’est qu’un mélange d’austérité et d’injustice et ne reprend pas cette mesure. Proposée par amendement, elle a été balayée par le 49.3 du gouvernement pour y introduire un gel des seuils pour les exonérations de cotisations sociales. Cette mesure minimaliste s’inscrit en faux par rapport aux conclusions du rapport d’information que nous avons diligenté avec mon collègue de la majorité Marc Ferracci.

Au cours de nos auditions, il nous est apparu que, plus une exonération concerne les salaires proches du Smic, plus elle peut avoir un impact positif sur l’emploi. Au-delà des exonérations de cotisations sur les salaires supérieurs à 2,5 Smic qu’il faut supprimer, ce sont également celles supérieures à 1,6 SMIC qu’il faut remettre en question. Les études économiques disent toutes la même chose : leur efficacité est contestable.

Ces exonérations, en plus de leur coût exorbitant, contribuent à la déformation du partage de la valeur ajoutée et à l’aggravation des inégalités économiques structurelles de notre société. Il est inacceptable que les fruits des cotisations soient détournés de manière aussi irresponsable. Il est temps de redonner un sens à la solidarité, et par conséquent à la cotisation sociale. Cela signifie freiner les exonérations de cotisations sociales qui ont sapé notre modèle social au fil des ans. La lutte contre la prolifération de ces exonérations est un nouveau front de la bataille sociale.

Le rapport présenté par Jérôme Guedj et Marc Ferracci est sur le site assemblee-nationale.fr